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La Suisse est connue pour ses montres, son chocolat, son fromage, mais aussi pour sa richesse. De nombreuses organisations à but non lucratif du monde entier s’intéressent donc à la Suisse en tant que marché pour la collecte de fonds. Mais comme pour tout autre pays, la collecte de fonds nécessite une bonne compréhension des tendances, des différences et des nuances. Dans cet article, j’ouvre une porte secrète sur quelques éléments clés que chacun devrait avoir à l’esprit avant d’entrer sur le marché suisse.

1- Les tendances du don en Suisse

Selon ERNOP, le montant total des dons, toutes sources de philanthropie confondues, représente plus de 4 milliards d’euros en Suisse. Habituellement, les fondations contribuent à plus de la moitié du montant total donné en Suisse (étude Giving in Europe, ERNOP), mais dernièrement, les dons individuels ont augmenté, en raison des différentes crises.

Si l’on regarde de plus près, le total des dons effectués par les particuliers en Suisse a atteint 2,5 milliards de francs suisses en 2022 (dernier Rapport sur les dons publié par Swissfundraising et Zewo). Ce chiffre record s’explique en partie par les 418 millions de francs suisses versés à l’Ukraine. Ce montant est supérieur de 22% à celui de 2021 et de 38% à celui de 2018.

8 ménages sur 10 font des dons, le montant annuel moyen donné par ménage atteignant 400 CHF. 89% des personnes âgées de 55 à 99 ans donnent, 82% des personnes âgées de 35 à 54 ans et 78% des personnes âgées de 15 à 34 ans. 

Les legs représentent également une part importante des dons. A titre d’exemple, en 2007, les Suisses ont donné 660 millions d’euros par le biais de legs, un montant considérable (ERNOP).

Bien que les citoyens suisses restent assez traditionnels dans leur façon de donner – les envois postaux directs ou les virements bancaires restent le moyen le plus populaire de faire un don et les dons effectués de cette façon sont en moyenne plus importants -, les tendances actuelles montrent que les dons sont de plus en plus numériques. Au cours des quatre dernières années, le montant des dons en ligne a été multiplié par cinq pour atteindre 117 millions de francs suisses. Twint, une application de paiement suisse, domine 80 % des canaux numériques directs.

Selon ERNOP, les ménages suisses donnent principalement pour : 

  • l’utilité publique et/ou sociale (35%)
  • la religion (21%)
  • la santé (11%)
  • et l’aide internationale (10 %), bien que ce pourcentage puisse évoluer en fonction du contexte.

2- Quid des fondations suisses ?

Voici quelques chiffres de l’édition 2023 du Rapport sur les fondations en Suisse publié par Swissfoundations, le CEPS et l’Université de Zurich :

Sur la répartition régionale:

  • 13’365 fondations en Suisse sont réparties de manière disparate dans les cantons.
  • La plus forte concentration de fondations se trouve dans le canton de Zurich (2’225), suivi par Berne (1’409) et Vaud (1’374).
  • Genève, avec le nombre élevé de nouvelles fondations, rejoindra bientôt le peloton de tête des trois principaux cantons où se concentrent les fondations, enregistrant une forte croissance positive (3,2%).

Sur le champ d’action:

  • 56% des fondations suisses ont un but lié à un lieu, une commune ou un canton. 
  • 25% des fondations sont actives à l’échelon national.
  • 23% des fondations travaillent à but international, la plupart dans l’éducation et la recherche, le social et la coopération au développement. La protection de l’environnement a connu une forte croissance au cours des dix dernières années.

3- Déduction fiscale

Dans Comparative Highlights of Foundation Laws by Philea, la Suisse utilise une déduction fiscale, c’est-à-dire une réduction du montant de croissance sur lequel l’impôt est calculé.

Pour les sociétés, au niveau fédéral, les contributions caritatives jusqu’à 20% du bénéfice net (après impôt) d’une société sont déductibles de l’impôt, à condition que certains critères soient remplis. En particulier, la contribution caritative doit être versée à des personnes morales suisses exonérées d’impôts en raison de leur but d’utilité publique ou exclusivement caritatif.

Pour les particuliers, une déduction (réelle) pour les dons effectués à une organisation caritative suisse qualifiée peut être demandée dans la déclaration d’impôt. Au niveau fédéral, et dans de nombreux cantons, la déduction est plafonnée à un certain ratio du revenu imposable.  Le minimum annuel et le montant déductible peuvent varier d’un canton à l’autre. Par exemple, dans le canton de Genève, un particulier doit donner un minimum de 100 CHF pour que le don soit éligible à la déduction fiscale.

4- Conseils pratiques à connaître

Au-delà des tendances, des données et du comportement des donateurs, il est important de comprendre que la Suisse est un marché difficile à pénétrer. En effet, le nombre élevé d’organisations internationales à but non lucratif ouvrant un bureau en Suisse a conduit à une protection croissante du marché. S’il est une chose dont vous devez vous souvenir, c’est que les ressortissants suisses détestent les organisations qui s’installent dans leur pays uniquement à des fins de collecte de fonds. Une organisation étrangère devra démontrer qu’elle est impliquée en Suisse, par le biais d’activités par exemple, et qu’elle apporte une valeur ajoutée. 

Sur la base d’une expérience pratique dans l’accompagnement d’organisations étrangères nouvellement établies en Suisse, voici quelques éléments à considérer avec attention :

  • Créer une structure officielle en Suisse, mais réfléchissez bien au canton dans lequel vous souhaitez le faire ;
  • Engager des citoyens suisses au sein du conseil d’administration. La gouvernance de votre organisation à but non lucratif sera étroitement surveillée ; 
  • Louez un vrai bureau, plutôt qu’une simple adresse, et montrez que vous employez des personnes locales ; 
  • Montrez que vos projets sont conçus par votre équipe en Suisse ;
  • Si vous avez des entités dans différents pays, ayez un portefeuille clair de projets dans chacun de ces pays ;
  • Prenez le temps d’apprendre à connaître l’écosystème et les différents réseaux qui pourraient vous être d’une grande aide pour vous donner plus d’astuces et de conseils ; 
  • Si vous êtes une ONG, envisagez de demander le statut ECOSOC, cela pourrait également vous aider à entrer dans l’écosystème de l’ONU ;
  • Soyez humble et ayez un état d’esprit de croissance, comprenez que la Suisse ne fonctionne pas de la même manière que ses pays voisins.

Enfin, n’oubliez pas que la Suisse est un pays fédéral, divisé en cantons, et qu’elle se compose de quatre régions linguistiques : la Suisse alémanique (germanophone), la Suisse romande (francophone), la Suisse italienne et la Suisse romanche. Au-delà de la spécificité nationale, il vous faudra donc approfondir votre connaissance du canton dans lequel vous souhaitez vous installer et communiquer dans la langue locale. 

Conclusion

Comme dans tout autre pays, une bonne compréhension du marché suisse combinée à un soutien professionnel de la part de personnes possédant une expertise et des connaissances est essentielle pour s’assurer que vous ne perdez pas votre temps, votre argent et votre énergie dans la création d’une nouvelle entité, qui pourrait finalement vite fermer ses portes.


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