La collecte de fonds est souvent perçue comme un exercice où il faut constamment chercher à obtenir plus de ressources. Pourtant, l’une des compétences les plus cruciales pour un fundraiser est de savoir quand et comment dire non. Découvrons pourquoi et comment établir des limites saines peut renforcer votre organisation sur le long terme.

1- Les conséquences cachées d’une approche « tout accepter »
Accepter systématiquement toutes les opportunités de financement peut sembler tentant, particulièrement en période d’incertitude économique. Cependant, cette approche comporte des risques significatifs :
- La dilution de la mission : Des financements assortis de conditions trop spécifiques peuvent vous forcer à vous écarter de vos objectifs principaux. Par exemple, une organisation environnementale qui accepterait de modifier ses critères d’évaluation de projets pour satisfaire un bailleur risque de compromettre son impact réel.
- L’épuisement des équipes : La multiplication des exigences de reporting, parfois contradictoires entre différents bailleurs, peut créer une charge administrative excessive. Cela détourne les ressources humaines du travail de terrain et peut mener à l’épuisement professionnel.
- La perte d’indépendance : Des financements trop importants provenant d’une seule source peuvent créer une dépendance dangereuse et limiter votre capacité à prendre des décisions stratégiques autonomes.
2- Trois exemples inspirants de « non » stratégiques
a. Médecins Sans Frontières et les fonds européens
En 2016, MSF a pris la décision historique de renoncer aux financements de l’Union Européenne et de ses États membres, représentant environ 63 millions d’euros par an. Cette décision faisait suite à l’accord UE-Turquie sur la gestion des flux migratoires, que l’organisation jugeait contraire à ses principes humanitaires. Malgré l’importance de ces fonds, MSF a préféré préserver son indépendance d’action et sa capacité à dénoncer des politiques qu’elle considère comme néfastes pour les populations vulnérables.
b. The Body Shop Foundation et L’Oréal
En 2006, lors du rachat de The Body Shop par L’Oréal, la fondation indépendante de The Body Shop a choisi de mettre fin à sa collaboration avec l’entreprise. La fondation craignait que les pratiques de L’Oréal en matière de tests sur les animaux ne compromettent ses valeurs fondamentales. Cette décision courageuse a permis à la fondation de maintenir son intégrité, même si cela impliquait de renoncer à une source majeure de financement.
c. Greenpeace et le principe de refus systématique
Greenpeace a institutionnalisé une politique de refus de tout financement provenant d’entreprises ou de gouvernements. Cette position radicale lui permet de maintenir une indépendance totale dans ses campagnes et ses actions de plaidoyer. L’organisation s’appuie exclusivement sur les dons de particuliers, ce qui renforce sa crédibilité lorsqu’elle dénonce des pratiques environnementales douteuses.
3- Comment évaluer quand dire non : guide pratique
a. Établissez vos critères en amont
- Définissez clairement par écrit vos lignes rouges éthiques et vos critères d’exclusion
- Impliquez votre conseil d’administration dans cette réflexion
- Communiquez ces critères à vos équipes pour assurer une application cohérente
b. Analysez l’impact global
Avant d’accepter un financement, posez-vous ces questions essentielles :
- Le coût de gestion (reporting, suivi) est-il proportionné au montant reçu ?
- Les conditions imposées respectent-elles votre autonomie d’action ?
- L’origine des fonds est-elle cohérente avec vos valeurs ?
- Existe-t-il des risques réputationnels à long terme ?
c. Préparez votre réponse
- Documentez soigneusement les raisons de votre refus
- Restez professionnel et courtois dans votre communication
- Proposez, si possible, des alternatives ou réorientez le donateur vers d’autres organisations plus adaptées
Conclusion
Savoir dire non en collecte de fonds n’est pas un luxe : c’est une nécessité stratégique pour garantir la pérennité et l’impact de votre organisation. Cette compétence demande du courage, mais elle est essentielle pour construire des relations saines avec vos donateurs et préserver l’intégrité de votre mission. En établissant des critères clairs et en les appliquant avec discernement, vous renforcerez la confiance de vos parties prenantes et contribuerez à une philanthropie plus éthique et efficace.
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